Acquisitions intracommunautaires : risque d’une double taxation à la TVA
	Une récente décision préjudicielle de la Cour de justice de l’Union européenne dans l’affaire T-638/24 réaffirme l’imposition à la TVA d’une acquisition intracommunautaire de biens lorsque la livraison exonérée a été erronément facturée avec la TVA du pays de départ.
Il s’agit d’une affaire opposant la société autrichienne D GmbH à l’administration fiscale autrichienne, au sujet du refus des déductions de TVA opérées au titre des années 2011 à 2015. Ces déductions concernaient la TVA autrichienne facturée à tort par des fournisseurs locaux sur des livraisons intracommunautaires de biens à destination d’autres États membres. En parallèle, les achats de ces biens par D GmbH étaient considérés comme des acquisitions intracommunautaires taxables mais non déductibles dans son pays d’immatriculation à la TVA (en Autriche), en raison de l’utilisation de son numéro d’identification autrichien. L’administration avait alors appliqué le « filet de sécurité » prévu à l’article 41 de la directive 2006/112/CE, transposé en droit autrichien.
Selon les conclusions de l’avocat général de la CJUE, présentées le 29 octobre 2025 :
- L’article 203 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de la taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprété en ce sens que :
 l’application de cet article, en raison de la facturation, par erreur, de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour des livraisons intracommunautaires exonérées, dans l’État membre de départ de l’expédition ou du transport, n’est pas de nature à s’opposer à l’imposition concomitante des acquisitions intracommunautaires correspondantes, dans le même État membre, en application de l’article 41 de cette directive.
2. L’article 41 de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens que :
la question de l’applicabilité de cette disposition est sans préjudice de l’article 68 de cette directive qui détermine, pour les acquisitions intracommunautaires, le fait générateur de la TVA. Celui-ci intervient, conformément à cette dernière disposition, au moment où l’acquisition est effectuée.
Bien que les livraisons intracommunautaires exonérées soient aujourd’hui subordonnées à l’identification fiscale de l’acquéreur dans un État membre autre que celui du départ des biens (directive 2018/1910), la décision de la CJUE du 29 octobre rappelle les risques fiscaux actuels liés à une gestion incorrecte des flux transfrontaliers :
- non-déductibilité de la TVA appliquée à tort par le fournisseur dans le pays de départ,
 - imposition à la TVA des acquisitions intracommunautaires sur la base de la nature économique réelle des opérations,
 - non-déductibilité de la TVA due par l’acquéreur dans son pays d’immatriculation lorsqu’il ne dispose pas du numéro d’identification TVA correspondant dans l’État de destination.
 
Il convient d’y ajouter les pénalités pour manquements déclaratifs, notamment :
- omission d’autoliquidation de la TVA sur les acquisitions intracommunautaires ;
 - non-respect des obligations déclaratives fiscales ou statistiques (EC Sales & Purchases Lists, INTRASTAT).
 
Points de vigilance
Cette jurisprudence souligne l’importance, pour les sociétés européennes, de sécuriser l’utilisation de leurs numéros de TVA intracommunautaire et de documenter les flux réels de marchandises. Une double charge économique peut peser sur les entreprises lorsque la TVA est facturée à tort dans l’État de départ et que la même opération est soumise à la TVA comme acquisition intracommunautaire. En pratique, l’entreprise doit alors obtenir le remboursement de la TVA indûment versée au fournisseur, souvent complexe en cas de faillite ou de litige transfrontalier. En cas d’erreur de facturation, la correction rapide des factures est essentielle pour éviter la perte du droit à déduction ou la taxation parallèle dans deux États membres.
Les entreprises engagées dans des échanges intracommunautaires devraient régulièrement auditer :
- la cohérence entre leurs factures et leurs flux logistiques réels,
 - la conformité des numéros d’identification TVA utilisés,
 - et la correcte indication des livraisons/acquisitions dans les déclarations intracommunautaires
 
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Source : Affaire T‑638/24
